les babillages de Chinette, les coloriages de Chinou
Voilà. Il y a deux jours je me suis rendu compte d’un mal que je traîne depuis plusieurs années : j’ai l’esprit français. Vous me direz, c’est vague. Demandez à un français d’avancer masqué son pied droit dans un champ où paissent les vaches et vous le verrez hésiter : son cerveau réagit de façon parfaitement aléatoire. Le testeur veut se ficher de moi, par plaisir de mettre mon pied dans la bouse. Alors le français que je suis avance le pied gauche. Le voilà piégé ! La bouse de vache envahit sa chaussure et il meugle de rage. Cet exemple me permet de vous signifier que je ne possède nullement la praticité chinoise, ni la zénitude japonaise ni les outils suédois pour mettre en place un quelconque objet à monter soi-même, en l’occurrence un abattant de WC. Un truc tout bleu azur pour cagader dans la mer en regardant le mur d’en face sur lequel j’ai scotché un poster de Métal Hurlant (un immeuble, dessin magnifique par ailleurs). Bref, j’ai attaqué le monstre, l’ancien, celui à remplacer, vers dix heures trente. Deux tiges filetées datant d’avant l’abbé Pierre qu’il m’a fallu manipuler à l’aveuglette, celles-ci étant sous la lunette des toilettes et les miennes (on dit « des lunettes »pour celles qu’on porte autour du nez) assez minables telle que ma vue déclinante. Rajoutez à cela un peu de vert de gris dans les rouages, et à la palpation la découverte d’un boulon qui régit le torticolis de la tige, mais bien entendu pas de clé appropriée pour débloquer l’un au profit de l’autre. Pas l’outil adéquat. Pas envie de desserrer ce sale boulon avec mes dents, ni d’appeler un plombier qui va encore me faire le coup du dentiste (mais c’est une autre histoire). Par miracle, je débusque dans une boîte à chaussures où j’ai rangé il y a fort longtemps un outillage de survie (un tournevis, une clé de 10, un marteau et une bande large de scotch, sans doute à l’époque où je voulais me débarrasser des emmerdeuses qui me menaient la vie dure), je découvre le serre kiki du boulon récalcitrant. En dix minutes les deux tiges et tous leurs artifices laissent place à deux trous béants, sales mais désormais inoffensifs. Mais ceci n’est que la première phase, celle qui précède l’arrivée des asiatiques et de leur logique, des croquis de montage avec de petits repères L et R, qui sautent allègrement selon l’angle où on les regarde. Mais c’est toujours d’une facilité enfantine, quand le résultat est avéré. Sauf quand on a l’esprit français.
Le déballage ne pose aucun problème, pas de reproches dans le foyer, sauf pour le tri, plastique ou carton ? Lequel est recyclable ? Là, je sens que Chinette s’emballe : « il est onze heures trente et j’espère que je pourrais aller aux toilettes avant ce soir ». C’est un cri du cœur, je le sais, je la connais. Cul nu sur la cuvette froide, mais en porcelaine de chez Jacob et Delafond (ou un concurrent), c’est quand même mieux que les toilettes sèches d’Haïti, non ? Elle ne dit rien, sauf : quel beau bleu, mon chou, tu ne trouves pas ? Puis on extirpe les diverses pièces du puzzle et les schémas pour le montage. En bon français, dans un premier temps, je reconstitue les deux tringles avec leurs éléments. Puis, alors que l’ensemble est monté, je m’aperçois qu’il faut d’abord faire entrer la tige, visser les éléments sous la cuvette et faire coïncider les deux blocs qui permettent de faire pivoter les abattants. Mais non, c’est pas du tout ça. Il est midi et demi. Je suis en train de faire un burn out, vite un défibrillateur. Bon, disons une bonne sieste. OK. Comment ça s’est passé, je l’ignore. Les chinois sont dans les téléphones portables et doivent envoyer des messages subliminaux. Comme en France les pékinois font leur crotte dans les squares avec toilettes à toutous (paraît-il).
De fait, la technique est simplissime. On monte le zinzin qui bascule l’engin, l’abattant, puis on place la tige filetée dans le trou, on serre le tout avec ses petits joints (pas ceux qu’on fume, car on risque de visser à l’envers et de perdre l’écrou dans la pénombre, ce que l’on nomme la mise sous écrou dans les prisons nationales qui punissent l’usage du haschich).
Enfin, quand tout est en place, comme un roi sur son trône on fait son cagadou en lisant Henri Cueco,(« le volcan ») avec la nostalgie de perdre à chaque fois un peu une part de soi. N’en déplaise aux vaches.
19 12 2021
AK
Parti trop vite, désolée… donc je disais que je ne connaissais pas le verbe cagader, c’est chose faite, un verbe de la Provence que certains ont voulu mettre dans la catégorie argot, je ne vois pas le rapport mais bon… il y a matière à un article (au moins), et j’ai bien ri, merci ! Très bonne soirée
J’aimeAimé par 1 personne
Je ne connaissais pa
J’aimeJ’aime
D’avant l’Abbé Pierre, ça va encore, chez moi ça date d’avant avant l’Abbé Pierre, si bien que l’écart ne correspond pas et que tu ne peux rien faire. Par esprit d’esthétique j’ai tout de même placé un abattant, fixé à rien, ce qui est très trompeur pour les visiteurs, occasionnant des chutes et des hurlements de la part de ces personnes habituées au confort moderne et stable. Quand on sait, ça va, on garde l’équilibre, sinon je préviens : » retire cet élément décoratif ( 😉 ) sinon tu vas tomber » et tu vois les gens ressortir avec des yeux ronds comme des soucoupes « ben tu peux pas tout changer ? » Non, c’est un truc d’époque, une antiquité qui se respecte.
On en a des soucis, hein ?! 🙂
J’aimeAimé par 2 personnes
Tu dois pouvoir trouver un écartement (mais en le mesurant avec des petits lutins appelés « maîtres » rubans. Ensuite, tu divises les 180 kms qui te séparent du continent (mais en décimètres, ne jamais oublier le décimètre, car les lutins corses sont de véritables brigands). Tu appuies sur le bouton Au secours. Personne ne vient. Ah si ! un type moche, un plombier avec un bicorne sur le crâne. « C’est ici, le truc d’époque ? » demande-il
-« Oui monsieur » (car tu es polie)
Il ôte de son crâne son chapeau, mesure la distance avec ses doigts, et te dit :
« – madame, j’adore les antiquités, voire je les respecte. Je crois en avoir une, jadis rapportée d’Égypte. Je vous l’installe demain. Pour l’abattant, contactez Karouge, un quincailler marseillais ou béarnais, qui le sait. Il vous fera un prix.
Bonne soirée !
J’aimeAimé par 2 personnes
Nan, nan, nan, personne ne touchera à cette antiquité, d’ailleurs ça ne gêne que les visiteurs et Sidonie s’en fout.
J’aimeAimé par 1 personne
Donc un musée amusant avec Sidonie pour la pause p…J’espère qu’elle a droit à une petite soucoupe de croquettes , sinon défense d’entrer !
Allez, bonne nuit !
J’aimeAimé par 1 personne
T’inquiète : les cabinets du néolithique sont très recherchés, c’est un must, préviens tes invités !
J’aimeAimé par 1 personne
Une belle tranche de vie !
Bonne soirée, illustre Karouge.
J’aimeAimé par 2 personnes
Pour les châteaux de carte, par contre je suis expert !
Bon vent, Maëstro !
J’aimeJ’aime