les babillages de Chinette, les coloriages de Chinou
En vidant des poches pleines de bouquins sans valeur, je suis tombé sur ce petit opuscule imprimé en 1952 chez Peyronnet et Cie, 8 rue de Furstenberg, Paris 6ème. J’adore la place du même nom, toute petite, qui appartient à un Paris que j’aime, celui des balades avec un appareil photo en main.
Si ce livret de Félix Ricquebourg ne présente pas un grand intérêt, s’y trouvent quelques pépites de l’art asiatique du Haïku. A noter la référence sur les emprunts à la littérature japonaise :
(premières pages) : HAÏ-KAÏ et TANKA
Haï-Kaï : tercet composé de deux pentasyllabes et d’un heptasyllabe suivant le schéma 5.7.5
Tanka : petit poème composé de deux pentasyllabes et de trois heptasyllabes suivant le schéma 5.7.5.7.7
Au XVII éme siècle vivait au Japon le prêtre bouddhique Bashô qui excellait dans l’art de composer des haï-kaï. C’est incontestablement l’un des maîtres du genre.
Un jour, l’un de ses élèves, Kakiku, lui présenta un tercet ainsi conçu :
« La libellule rouge,
Otez lui les ailes,
C’est un grain de piment. »
Haï-kaï cruel que le Bonze Bashô ne pouvait accepter, lui dont la religion, toute de bonté, étendait sa mansuétude aux animaux même.
Il le transforma comme suit :
« Un grain de piment rouge,
Mettez-lui des ailes,
C’est la libellule. »
Ces deux belles images me suggérèrent spontanément des rimes. J’écrivis :
1: Rouge demoiselle
A qui l’on ôte les ailes,
Piment se révèle.
2: Un piment
rouge ardent
Mets-lui des ailes de tulle:
C’est la libellule.
Ce fut pour moi une révélation. Je compris quelle possibilité offrait le haï kaï. Point de long poème pour mettre en relief une idée poétique ! Une notation brève pour la saisir toute vive, tandis que rimes ou assonnances (sic) viennent chanter leur musique à l’oreille et prêtent à d’heureux effets.
Souvent la contemplation prolongée d’un spectacle provoque chez le poète une émotion soutenue. Elle suscite en lui une série de haï-kaï, née d’impressions fugitives. Qu’il soit alors permis à l’auteur de les présenter en une suite continue comparable aux maillons d’une chaîne dont l’ensemble forme un tout.
OMBRE DES MORTS :
Heurtant ma fenêtre
Qui s’obstine à méconnaître
Mon jaloux bien-être?
Vent qui te lamentes (sic)
N’es-tu la plainte vibrante
De quelque âme errante ?
………………………..
EFFETS DE LUNE
Ce matin, au réveil,
Il fait si froid ! que la lune au ciel,
N’a pas fondu au soleil.
……………………………….
LE FLAMANT
Est-ce oiseau qui rame
L’air, ou démoniaque flamme
Pourchassant une âme ?
Bon, il faut (hélas ?) reconnaître que les Haï-Kaï de Félix Ricquebourg ne sont pas terribles ! Mais bon, aujourd’hui j’ai fait avec !
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