Les mardis de la poésie : Giuseppe Ungaretti (1888-1970)

Merci à ce blog(en italien) qui m’a « redirigé » vers Ungaretti : https://viaungarettidue.wordpress.com/2022/04/01/conoscevo-aprile/

Poème tiré du site : http://www.barapoemes.net/archives/2017/05/13/35279130.html

Les fleuves

Je m’appuie à un arbre mutilé

Abandonné dans cette combe

Qui a la langueur

D’un cirque

Avant ou après le spectacle

Et je regarde 

Le passage paisible

Des nuages sur la lune

Ce matin je me suis étendu

Dans l’urne de l’eau

Et comme une relique 

J’ai reposé

L’Isonzo en coulant

Me polissait

Comme un de ses galets

J’ai ramassé

Mes os

Et m’en suis allé

Comme un acrobate

Sur l’eau

Je me suis accroupi

Près de mes habits

Sales de guerre

Et comme un bédouin

Je me suis prosterné pour recevoir

Le soleil

Voici l’Isonzo

Et mieux ici

Je me suis reconnu

Fibre docile 

De l’univers

Mon supplice

C’est quand

Je ne me crois pas

En harmonie

Mais ces occultes

Mains

Qui me pétrissent

M’offrent

La rare

Félicité

J’ai repassé

Les époques

De ma vie

Voici

Mes fleuves

Celui-ci est le Serchio

C’est à lui qu’ont puisé

Deux mille années peut-être

De mon peuple campagnard

Et mon père et ma mère

Celui-ci c’est le Nil

Qui m’a vu

Naître et grandir

Et brûler d’ingénuité

Dans l’étendue de ses plaines

Celle-là est la Seine

Dans ses eaux troubles

S’est refait mon mélange

Et je me suis connu

Ceux-là sont mes fleuves

Comptés dans l’Isonzo

Et c’est là ma nostalgie

Qui dans chaque être

M’apparaît

A cette heure qu’il fait nuit

Que ma vie me paraît

Une corolle

De ténèbres

Cotici, 16 août 1916

Traduit de l’italien par Jean Lescure

In, Giuseppe Ungaretti : « Vie d’un homme : Poésie 1914-1970 »   

Editions Gallimard (Poésie), 1981

Où la lumière

Comme alouette ondoyante
Au vent gai sur les prés jeunes,
Viens, mes bras te savent légère.

Nous oublierons ici-bas
Et le mal et le ciel,
Mon sang trop rapide à la guerre,
Les pas d’ombres qui se souviennent
En des rougeurs d’aubes nouvelles.

Où la lumière n’émeut plus de feuilles,
Soucis et songes débardés sur d’autres rives,
Où le soir s’est posé,
Viens, je te porterai
Aux collines dorées.

L’heure stable, délivrés de l’âge,
Dans son halo perdu,
Sera notre lit.

© Giuseppe UNGARETTI
Extrait du recueil Sentiment du temps, traduit par Philippe Jaccottet

Poème tiré du site : http://www.poetika17.com/poemes

Biographie : https://fr.wikipedia.org/wiki/Giuseppe_Ungaretti

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