Marcher, éloge des chemins et de la lenteur

Un nouvel opus de David Le Breton (ed Metailié, 9 euros), dont voici un (très) court extrait :

« Dans  Eloge de la marche j’ai évoqué cette humanité assise et immobile qui nous caractérise aujourd’hui, le fait pour nombre de nos contemporains de passer de leur lit à leur voiture et à leur bureau avant de revenir s’asseoir devant la télévision le soir venu. Corps superflu, surnuméraire, encombrant (Le Breton, 2011) mais qui se rappelle à l’ordre par le sentiment de malaise d’être ainsi mis entre parenthèses. Puisque la condition humaine est une condition corporelle, un exercice régulier de compensation s’impose en courant ou en marchant inlassablement sur des tapis de jogging en écoutant la même musique que dans sa voiture ou dans ses déplacements urbains, ou en regardant la télévision judicieusement placée. Une telle activité est un exorcisme de la marche et une manière utilitaire de se  dépenser sans avoir à se confronter au risque de la rencontre ou de découvrir des paysages de toute beauté. Dans la salle de mise en forme ou chez soi, à l’abri de toute surprise, l’individu satisfait alors à une hygiène en se garantissant que ses habitudes sédentaires ne seront pas battues en brèche. En tournant dans son bocal,il s’affranchit de la peur de la rivière. « Quant à moi, dit Stevenson, je voyage non pour aller quelque part, mais pour marcher. Je voyage pour le plaisir de voyager. L’important est de bouger, d’éprouver de plus près les nécessités et les embarras de la vie, de quitter le lit douillet de la civilisation, de sentir sous mes pieds le granit terrestre et les silex épars avec leurs coupants » (1978,76).

Un auteur qui donne envie de lever le pied, comme la plupart de ces écrivains aventuriers et arpenteurs (Nicolas  Bouvier, Sylvain Tesson, Jacques Lanzmann, Kenneth White, Victor Ségalen,…)

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