les babillages de Chinette, les coloriages de Chinou
C’est fou comme parfois les jeunes vieillissent plus vite que les vieux fous qui leur ont sans doute quelque part volé leur adolescence (car ils se sentent jeunes, eux) avec des mots qu’ils comprenaient trop bien : l’Avenir, les Études, le Travail, la Politique. Tout cela est révolu, personne n’y croit plus. L’eau de Jouvence qui coulait de sources en fontaines a été avalée par des vieillards, des soiffards et les jeunes n’ont plus qu’à tirer sur la queue des miquets dans les manèges qui tournent en boucles musicales râpées sur leur smartphone, cette étrange stratégie du néant, stratégie que les vieux possèdent car eux n’ont plus d’avenir, juste un jeu : empêcher les gosses de grandir pour leur faucher la place auprès des filles qui ont toujours vingt ans.
On dit dans le petit pays que les falaises sont plus hautes que la chute. Que fallait-il comprendre dans cet adage ? S’agissait-il de la fin d’une phrase, d’une pensée, ou des reins de Louise ? Sans doute un peu de tout ça. La cambrure de Louise, l’angle qu’elle révélait de profil entre son fessier et son dos de nageuse (sans parler de la poitrine proéminente) entretenait le mythe, tant chez les jeunes que chez les vieux paillards du bourg attablés au bistrot faisant face au collège. Les autres cafés avaient fermé boutique car tous les clients les avaient désertés, je parle ici des clients qui tiraient depuis des années la queue du miquet, bref, des retraités. Voir sortir du collège ces jeunes enjoués qui ignoraient ce qui allait leur tomber dessus, le regard fixé sur leur smartphone, les réjouissaient.
Les vieux piliers de comptoir étaient toujours à « l’agachon », c’est à dire aux aguets. Les jeunes professeures de trente ans les intéressaient aussi, car ils se savaient exclus du paradis terrestre depuis que dieu avait décidé d’interdire le tirage de queues de miquets au profit du loto et d’autres jeux idiots pour lesquels ils pariaient depuis qu’ils étaient devenus parias. Après les cours, en cette période de vacances d’été proxime, trois professeures venaient s’étancher au bistrot et discouraient entre elles de leur antépénultième journée laborieuse, de leurs amants passés et à venir, et du temps des cerises, avec un accent moqueur que les pochetrons écoutaient avec attention. La plus jeune d’entre elles, Maryse, était la plus bavarde des trois. Elle achevait sa première année d’enseignement de Français et se demandait si elle ne ferait pas mieux d’apprendre la langue des signes en Bretagne pour que sa classe soit moins bruyante lors de son retour, fixé à dans quatre ans dans cet établissement (les trains bretons ayant des chapeaux de roues ronds).
Les agachonnistes scrutaient, l’air de rien Maryse, qui sous sa chemisette blanche en satin batifolait avec ses bras, les agitant comme des ailes d’oie , une Léda de province qui se prenait pour Zeus au palais de l’Élysée. Ces fins observateurs furent quelque peu déçus du fait que Maryse n’avait pas de poitrine, quand ses deux amies en avaient à revendre, vu leur ancienneté à maîtriser ces sales gosses auxquels on inculquait, année après année, l’Avenir, les Études, le Travail, la Politique. On raconte, dans le petit pays, que gueuler et enguirlander les enfants rétifs développe la poitrine des enseignantes de collège.(dixit le Maire)
Certes, Maryse n’avait ni poitrine ni soutien gorge, mais ses tétons pointaient comme des cannelés de chez Baillardran sous sa chemise légère. Ces vieux marauds en salivaient et commandaient à boire de l’eau de Jouvence de plus en plus virtuelle. La source et surtout la fontaine commençaient à couler à l’envers.
Dans deux jours les gosses seraient aussi cons mais libres d’aller plonger dans l’été torride qui s’annonçait. Tant qu’il y aurait de l’eau dans la piscine municipale et de la connexion dans le smartphone, peu leur importait la marche du monde. Faire des poutines aux filles, des fois aller plus loin, telle était leur vision du monde qui allait leur tomber dessus.
« Là, tout n’est qu’ordre et beauté, luxe calme et volupté » (Baudelaire)
On dit dans le petit pays que les falaises sont plus hautes que la chute. Que fallait-il comprendre dans cet adage ? S’agissait-il de la fin d’une phrase, d’une pensée, ou des reins de Louise ? Sans doute un peu de tout ça. Il faut partager la responsabilité des uns et des autres. Les jeunes filles deviennent femmes les adolescents s’habillent en adultes responsables. Entre temps, la vie parcourt les moments décisifs de l’aventure humaine. Les vieux ne rêvent plus d’atteindre le sommet des montagnes, les jeunes en sont empêchés par des barrières sociales et financières. Hier survit encore et toujours à demain…
10 07 2022
AK
Zut je ne parviens pas à lire la vidéo 😕
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Pour la fin du texte, faut que je recommence !
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En verlan c’est mieux ?
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Et comme le chantait Brassens, le temps ne fait rien à l’affaire !
Bon dimanche avec Maryse, illustre Karouge.
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Sur l’île déserte il faut tout emporter… (chez ELLES… bien sûr)
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