Rions un peu : Tesla ? Oui, mais j’ai la tête dans les étoiles.

Allemagne: une Tesla poursuivie un quart d’heure par la police pendant que son conducteur dormait

La police allemande a été confrontée à une scène étonnante. Le 30 décembre, vers midi, la police routière de Bamberg décide de contrôler une Tesla qui roulait sur l’autoroute A70 en direction de Bayreuth. Malgré les multiples signaux et coups de klaxons l’invitant à s’arrêter, le conducteur ne réagit pas.

C’est à lire ici : Libération

Les mardis de la poésie : René Depestre (1926-…)

René Depestre est un poète, romancier et essayiste né le 29 août 1926 à Jacmel en Haïti.

poèmes tirés du site : https://www.poemes.co/

Conte d’un Poète barbu

Barbu j’ai des atomes crochus avec les pluies et les étoiles, les souffrances et les fêtes de tous mes foyers d’origine.

Dans une histoire masquée ma barbe risquait d’être un palmier aveugle à vie au lieu d’un conte de fées.

Pour la barbe des poètes

il n’y a pas de commandant en chef

ni d’ayatollah cubain inspiré

ni de gestionnaire du sacré.

Mes poils gris sont des racines qui voyagent partout avec moi : je les porte, les pieds dans la boue, la tête dans la conscience émerveillée.

2

Sans la barbe je serais la proie d’un rude travail de deuil et de nostalgie ; ma barbe me tient à l’abri du panier de vipères et de crabes des exilés.

Venue de la mer caraïbe ma barbe a les pieds sur la terre et pour plaire au clair de lune il lui arrive aussi de voler.

Proche des sept femmes de l’arc-en-ciel la nuit ma barbe est phosphorescente ; pour célébrer le lotus de la femme aimée ma barbe est un imaginaire qui bande bien.

CHANGEMENT DE VITESSE AU VOLANT D’UNE ROUSSE

Le souffle coupé j’avale ton miel

je mords âprement à ton millefeuille

je suis le feu je grimpe aux cordages

de l’arbre du bien et du mal : vorace,

Carnivore, pirate éperdu, je te mange

je te bois, je te dévore en macho fou

de tes
Indes occidentales fou perdu

de ta galerie de fête et de mystère

je vis ta conque en voyageur inassouvi

au moulin à magie et à café fort noirs

où je mouds le bonheur en poudre de sucre roux.

SEPT RETOURS A LA VIE D’UN HOMME

Le chant désolé d’un hibou

a interrompu son rêve d’Africain.

A l’heure des coqs en
Angola

une nuée dansante

de jeunes filles ont confié

la pierre bleue de son chemin

au flux et au reflux de la mer.

O
Mario ! sur le bord en cristal

du temps de guerre qu’il fait dehors

tes pas de voyageur égaré

font un bruit de rivière sur le gravier

tandis que ta mort tourne sept fois

autour de ma maison audoise qui obéit

à la seule logique de la vigne.

La petite-mère-révolution aux abois

l’ayant fait descendre de son cheval

c’est à pied que
Mario de
Andrade

a traversé les fumées au tunnel du siècle

pliant l’épaule

sous le baluchon de ses idées

d’homme libre.

L’ombre mortifère de l’époque s’est arrêtée à sa porte : une géométrie sans foi ni loi a fait déborder le lait de ses jours.
Dans vingt ans il sera plus jeune que le temps de sa mort.

Attends-nous sur la colline

avec l’oiseau-phosphore des poètes ;

au soir du dernier automne attends-nous sous l’écorce du baobab, attends-nous avec ton foulard magique : pour ouvrir d’autres collines à notre foi en père d’une percée
jamais vue du monde.

Personne mieux que toi ne peut voir

ce qui nous arrive après les contes

amers du
XXe siècle.
Au jour

venu de la montée des lumières de l’homme

et du citoyen

sois le matin de rosée

qui donne sève et sens à notre espoir.

Si meurt mon
Mario de
Andrade que la chair de la beauté berce sa mort sur une colline d’Afrique au carrefour où les dieux attendent pour les rouvrir les yeux qu’aura un jour la nouvelle enfance des
Justes !

Pour en savoir plus : https://fr.wikipedia.org/wiki/Ren%C3%A9_Depestre

La dernière nuit blanche du Grizzly

lundi 28 décembre 2009 par AK Pô

Tout a commencé par une petite annonce parue dans le Fairbank Daily News, un quotidien de l’ Alaska (EU) profond. Un français, un certain AK Pô, recherchait un ours pour lui tenir compagnie cet hiver. Tout était payé ; ainsi, le vol Anchorage-Pau aller-retour, les frais de séjour et le miel à volonté m’ont incité à répondre à l’offre. D’autant que le cours du dollar me permettrait, dès mon retour, de monter ma petite saurisserie de harengs et de saumons, en saison. Le fait que je sois noir n’était pas un problème, d’autant que mon pull over était orné d’un grand V à son encolure. Mon employeur potentiel m’écrivit qu’en outre, une fois loin des rives du Yukon, je pourrais éventuellement me présenter comme basketteur à l’Elan Béarnais, au vu de ma grande taille. Avais-je déjà quelques notions de ce sport, existait-il une équipe genre les Caribous de Juneau ? Je mentis en répondant que oui, sachant que le sport pratiqué ici était plutôt le hockey, dont la célèbre équipe des Ours Polaires de Sitka était la plus populaire, malgré le petit nombre d’habitants de cette ville (environ 8000, avec les castors et les inuïts, yupiks, amérindiens et aléoutes).

Je reçus très rapidement ma feuille de route, et c’est ainsi que le mardi 22 décembre 2009, à huit heures AM pétantes, je survolais le Mont Mac Kinley (6194 m), puis la Sibérie et Moscou, où j’achetais au passage une chapka en renard blanc ; ensuite je m’endormis. Paris fut la dernière escale ; je me perdis dans les couloirs de transit en recherchant « la porte des Pyrénées » et finis par trouver la porte d’embarquement , renseigné par un chef de gare que les grèves obligeaient à voyager par les airs (à mon avis, c’était un prétexte pour rencontrer des hôtesses).

J’atterris donc en début de soirée, le 23, à l’aéroport de Pau-Pyrénées, en compagnie de quelques anglo-saxonnes et d’un dirigeant de parti politique à grandes oreilles. Une brise glaciale cinglait les joues cramoisies des anglaises, et j’acceptai sans problème de partager le taxi pour nous rendre au centre ville quand celles-ci me firent signe de me joindre à elles. Elles me câlinèrent en chemin, ce qui fit faire au chauffeur quelques écarts, qu’il nous dit être liés au verglas, courant à cette époque-là de l’année. A french liar, me sussurèrent-elles à l’oreille. Quant à mon hôte, bien entendu, il ne s’était pas déplacé pour venir m’accueillir. Je me demandais quel genre de zigoto ce devait être. Avait-il de grandes oreilles ? Ce petit pays me parut tenir dans un mouchoir de poche, tant par la rapidité avec laquelle nous parvînmes au centre que par la ressemblance frappante des individus emmaillotés que nous croisâmes.

Les anglaises déposèrent leurs bagages devant le Conti, un hôtel connu comme le loup (blanc) des steppes pour sa façade romantique ; quant à moi, sur les indications du chauffeur de taxi, je pris la direction du domicile d’AK Pô, dont la proximité ne faisait aucun doute, selon les dires de l’homme. Les rues que je suivis étaient aussi désertes qu’un écran de télé, mais éclairées par mille ampoules festives bleutées et scintillantes. Les voitures stationnées se paraient de givre, et quelques unes s’en protégeaient par de petits papiers à deux épaisseurs scotchés aux essuie-glaces. Certaines en possédaient plusieurs, formant une couverture sommaire et pitoyable, et l’on imaginait avec une once de dégoût le zèle qu’avaient mis les auteurs de ces actes à ainsi décorer les pare-brises de papillotes si ternes, et rabat-joie. Sans doute s’agissait-il d’une tradition ancestrale, un genre papillons d’hiver pour soutenir les apprentis d’Auteuil (voire de Neuilly) ou les orphelins de la Police.

Sur la porte du n°45 de la rue en question (que le narrateur vous remettra contre un chèque de deux cents euros rédigés à son nom, sur demande expresse et lettre de motivation manuscrite, datée et signée de la main gauche uniquement),un heurtoir en forme de petite main en bronze pendait, lequel, quand on frappait l’huis avec, fredonnait l’air de « la petite main sur la porte de bois ne bouge pas, ne remue pas, même pas le petit bout du doigt », de J. Prévert mis en musique par W. Kosma. C’était épatant. Sauf que personne n’ouvrait. J’eus beau tambouriner, rien. Un camion de pompiers fila en silence dans la nuit, un chat feula, une mouette insomniaque rit, une sirène danoise perdit tout espoir, un troupeau de moutons des îles Shetland traversa au passage piétons, je vis ma vie défiler en une fraction de seconde (c’était bien assez) devant mes yeux, mais la porte du paradis resta close. Finalement, ce devait être la fameuse porte des Pyrénées, et mieux valait chercher un aimable samaritain pour me loger cette nuit, car vu le niveau de mon dollar, je serais bon pour dormir sous une canadienne (tabarnak !). Quant à ce saligaud d’AK Pô, je lui ferai la peau, à ce vendu, parole d’ours !

Une semaine durant, j’errais ainsi, dans les rues et les faubourgs de Pau. Personne ne me remarquait, tous étant munis de vêtements recyclés bien chauds, polaires colorées et cache-nez en bison gersois, passe-montagnes et cache-cols aubisquins (en laine vierge), les yeux rivés sur les vitrines miroitantes, les feux tricolores changeants, les luminosités rouge carmin et les orangés des freins et des clignotants des voitures, bref chacun était plongé dans son merveilleux monde d’ineffable désir consumériste. Je dus me nourrir de kébabs, faire les poubelles comme mes congénères du pays du soleil de minuit, faire semblant d’être en peluche pour encaisser quelque menue monnaie, éviter quelques montagnards des hautes vallées descendus en ville, guidés par l’étoile du berger, sans parler de la difficulté à trouver une place libre dans un cyber café surchauffé.

Cela dura jusqu’au soir du trente et un décembre. Car, on a beau se faire une raison, on a toujours tort quelque part, quand tout arrive. Et cela arriva : je vis AK Pô. Quelle ne fut pas ma surprise (lui ne m’avait pas vu) ! Du haut de son un mètre cinquante, talonnettes non comprises, il portait un gibus ridicule et son visage s’ornait de deux rouflaquettes, qui s’ourlaient sur une impériale jusqu’au bas de son menton trop large (sans doute était-il beau parleur). Ses yeux tournoyaient dans leurs orbites comme deux planètes surveillées par des satellites géostationnaires, l’un russe l’autre étasunien, et son nez frétillait en se gorgeant de CO2, comme les saumons de mon Yukon natal. Il se tenait debout, immobile, face à un distributeur de lait installé sur la place Clémenceau, près de la banque I. (le narrateur se réserve le droit d’en donner le nom uniquement après remise des chèques demandés plus haut). Je me demandai comment faire payer à ce nain sa forfaiture, car, bien que ma nature ursine ne soit point prédestinée à une quelconque vengeance (les ours étant considérés comme les ancêtres de l’homme), une punition bien méritée me sembla juste.

L’empoisonner avec un pot de miel, ou de confiture, me parut une bonne méthode. Ne m’avait-il pas promis du miel à profusion, dans son contrat non tenu ? Mais le miel était rare, cet an-ci. Les frelons asiatiques avaient réduit les ruches à des alvéoles creuses mais froufroutantes pour ceindre la taille -fine- de leurs petites copines liseuses de mangas édulcorés. Pour la confiture, il fallait aller au bout de la rue Joffre, chez Coucougnettes, et je n’en avais ni le temps, ni les moyens. Il ne me restait plus qu’à le fumer comme un saumon. Sitôt dit, sitôt fait. Plongé dans la saumure, va donc implorer saint Sylvestre l’hébergeur de fêtards, puisque tu m’as refusé ton hospitalité. Du sel, du séchage, et de la fumée de bois de hêtre te rosiront la chair, AK Pô, et, si tu ne passes pas l’année, au moins tous les noceurs se régaleront de t’avoir à leur table.

C’est alors que je m’aperçus de ma profonde erreur, que je m’étais planté : ce n’était pas lui ! Comment me rendis-je compte de ma bourde ?

Quand, vers minuit, pendant que sautaient les bouchons et klaxonnaient les bouteilles de champagne, une place se libéra dans le cyber café de la rue Montpensier, où je me réfugiai en hâte. Griffougnant sur un clavier dispo, je tapais son nom par mégarde sur google. Et bien, le chenapan vivait à Fairbanks, Alaska, dans une PO box ! il avait même créé un blog, en forme d’igloo ou de yourte, et on pouvait le voir sur une photo de groupe, entouré d’inuïtes aux dents pointues et aux technologies aguichantes, étendues toutes nues sur des peaux d’ours blancs faisant semblant de dormir.

Cela me rendit furax. D’un bond, je franchis la porte des Pyrénées, d’un autre je sautai le mont Mac Kinley, d’un troisième enfin je me présentai à lui, passant ma tête par la lucarne de son blog, et hurlai, comme savent le faire les vrais grizzlys :

Hey, AK Pô ! Tu pourrais au moins souhaiter la bonne année à tes lecteurs !

Ce qu’il fit sans barguigner, car 2023 sera : une grande année pour les lecteurs du Petit Karouge Illustré !

-par AK Pô

25 12 09

(remasterisé 31 12 2022)

Télépastichons !

J’ai du perdre quelque part mon sens de la vie, le pourquoi et le comment y parvenir ou le retrouver. Le monde que j’habitais jadis est mon aquarium, l’intelligence est artificielle depuis l’invasion des algorithmes dans la géopolitique de la vie quotidienne. Rien ne persiste, tout s’efface. Hier soir encore, quand j’ai regardé ma femme, je l’ai prise pour une représentation holographique, comme en laissent certains hommes politiques. D’ailleurs, avec ma femme ,on ne se parle plus, on « télépathise ». Nos conversations silencieuses ne sont troublées que par le four qui bippe, la machine à laver qui bippe, le lave vaisselle qui bippe, ou les chats qui miaulent ; le mieux, c’est de n’avoir pas de chat chez soi, leur ronronnement crée des interférences dans la conversation télépathique. Ce fait a été prouvé par des études de l’université de Pétaouchnock, dont j’ai obtenu le diplôme par internet en tant que professeur honoraire voici quelques jours, et j’en profite pour vous dire que je viens d’éditer mon livre, « La Télépathie, les lendemains de la Télévision », aux éditions Didonc.

Je relate, dans mon livre, comment je me suis entretenu avec ma mère, décédée depuis plusieurs années, en m’asseyant simplement sur sa tombe. Cela se situe dans un cadre intime que je ne puis aborder ici. Par contre, le cimetière avait bien des faits, des anecdotes et des crimes de sang qui intéresseront mes (?) lecteurs plus tard (ma mère était très bavarde), et notamment ce fait divers qui alimenta les journaux durant la pénurie de papier toilette et d’huile de coude qui connut un pic avec celle de la moutarde dans les rayons solaires des supermarchés.

Il s’agissait d’un certain Julius, né en 2001 à Pontoise. Un type comme les autres, mais comme il était comme les autres personne ne se douta qu’il était en fait un robot.Ni asiatique ni noir, ni arabe, ni blanc, un bonhomme qui fait son marché dès que les camions de Rungis parcourent la France entière et que les commerçants se mettent à chanter les louanges des produits qu’ils vendent. Julius aimait rôder d’un étal à l’autre, écoutant les paroles prononcées à hauts cris qui semblaient dans ses oreilles devenir un opéra aux instruments rudimentaires : les hachoirs des bouchers, les tranchoirs des poissonniers, le couteau musical des maraîchères, et ce chœur chaleureux des clients dans les allées , tout cela investissait son cerveau artificiel, et quand il retrouvait sa compagne robote, du nom androïdique de Louise, sans user un seul mot, qui puisse être mal interprété par les câbles e.sociaux. Il rapportait les courses et les ragots du marché, dont ensuite tous deux se délectaient devant leur ordinateur connecté au Cosmos

Entre eux, pas besoin de parler. Louise lui servait un verre de vin blanc et prenait pour sa part un café noir des monts de la Lune (Éthiopie) bien qu’il fût midi, et mettait un CD de Natalie Cole. Julius la connectait ensuite sur une autre planète dotée de sept ciels et malheureusement les chats aux abords de leur logis se mettaient à interférer en miaulant comme des diables quand on tire leur queue fourchue. L’histoire de ce couple tranquille fut révélée dans la gazette locale dans la chronique des faits divers interstellaires. Le drame se déroula un soir de panne générale d’électricité alors qu’ensemble ils traversaient la rue pour se réalimenter sur une borne fonctionnant au Carbone 14. Un camion fou, arrivant de Rungis, en retard (5 secondes sur le GPS) pour livrer sa marchandise les percuta. On découvrit alors que leur carapace était bourrée de minerais issus de terres rares (les monts de la Lune) et l’on douta longtemps de l’origine de ces deux ruisselets qui coulaient de leurs entrailles cybernétiques, l’un noir comme du café, l’autre blanc comme un château Yquem.

Depuis, avec mon épouse, nous buvons nos paroles sans mot dire, ni maudire les algorithmes qui galopent dans le salon en faisant bip bip. À noter que nos chats sont dressés naturellement, sans OGM ni croquettes Nestlé (Purina et autres), et se nourrissent de ces bruits intempestifs. D’autant que nous n’avons plus d’électricité car incapables de payer la facture géopolitique de notre vie quotidienne.

29 12 2022

AK

La vie rêvée des filles

samedi 27 février 2010 par AK Pô

Pour les dix sept ans de Cathy, hier, son père, qui est un âne et dont je suis l’ami, lui a offert une mobylette d’occasion. Il n’a pas suivi mon conseil. Je lui avais proposé, pour cet anniversaire, une location longue durée d’un réverbère de la place de la Libération, où ainsi sa fille adorée aurait pu, par tous temps et à toute heure, attendre son amoureux, tout en promenant Raffy, le chien de la famille. Il m’a simplement rétorqué que, place de la Libération, les réverbères sont fixés au sol et n’éclairent que les décisions de justice, que, de plus, ils penchent et puent des pieds, par le fait d’une population canine trop dense dans les parages. Donc, Cathy a eu une mobylette et l’âne, c’est toi, je me demande parfois si tu es vraiment mon ami. Bon, n’insistons pas.

La mob est bleue, comme les yeux de Cathy, la chaîne du cadenas ressemble à celle de bagnards qui descendraient les marches du palais un jeudi après-midi et est noire comme une conférence de presse donnée sur le perron pour expliquer au petit peuple pourquoi cette femme, employée dans une grande surface, a été licenciée pour avoir utilisé des bons d’achat (de 0.40 à 2.10 euros) , donné en caisse aux clients, aux dépens de l’entreprise(*). Nul n’est censé ignorer la loi, y compris les vautours et les corbeaux. Un autre accusé sortira la semaine prochaine, ayant détourné deux millions d’euros, avec une condamnation de peine avec sursis et quelques euros d’amende, pour marquer le coup et impressionner les petits malfrats qui ne savent pas encore s’y prendre pour naviguer sans rames dans l’escroquerie financière. Le casque, cet indispensable attribut du vélomotoriste, est intégral comme le conseille la prévention routière, et son port recommandé, contrairement à la burqa, qui ne protège ni ne fait sortir des ornières intégristes celles qui en sont dotées.

La veille de l’anniversaire, une dispute familiale avait éclaté lors du dîner, opposant Cathy à ses parents. Elle était persuadée que ses parents lui offriraient un yacht, et quand elle entr’aperçut le papier d’emballage dans le garage, elle dut se rendre à l’évidence que la taille de celui-ci ne lui permettrait que de piètres croisières au pied des eaux cascadantes de la place de la Lib, dans les bassins où, l’Eté, se reflètent les roses rouges qui parent les tonnelles, et elle fut prise d’une crise d’apoplexie mentale, de malaise vagal, bref d’une série de petits syndrômes apocalyptiques qui sont tout le contraire d’un désir de rencontre amoureuse.

Son père eut beau la tancer en lui disant que ce n’était pas ainsi qu’elle se trouverait un gentil garçon pour descendre le Nil en félouque, ou capable d’entrer chez Marrimpouey pour lui offrir un livre sur Cami, ni chez le marchand de roses dont le gros labrador blanc fait la sieste sur le seuil des petites amourettes, ni personne digne de ce nom c’est à dire Personne en personne, ou Pessoa em Pessoa, pour les lusophones.

Maman Irma, qui avait jusque là conservé son mutisme dans une délicieuse mousse au chocolat avec un coulis de framboises et un semis de pistaches concassées, se mit à renchérir : ma fille, calme toi, et toi, âne que tu es, tais-toi donc un peu. Vous savez tous deux que la vie est difficile, il nous faut économiser le moindre sou. La violence s’installe partout, les bancs de la place sont pris d’assaut par des réfugiés climatiques descendus des bureaux du tribunal, les vieillards rampent au soleil de l’esplanade, tirés par leurs chiens maigres qui connaissent la soif et qu’attire l’eau bondissante des fontaines, laissant leurs maîtres croustiller sous l’irradiant soleil. De petites vieilles, fagotées comme des sylphides, errent sur le gazon en quête de conversation, pendant que de jeunes godelureaux roulent à tombeau ouvert en conduisant avec leurs pieds des voiturettes décapotées à une seule place. Sans parler des prix prohibitifs pratiqués par les marchands ambulants, glaciers, vendeurs de cartes postales coquines, liseurs de bonne aventure, collectionneurs de papillons délégués par le ministère des finances, banquiers repus grivelant de crédules emprunteurs, examinateurs de bonne conscience, consultants en commissions de consultation bien en chair diplômés d’Oxford ou de Blanquefort (Exford), bref mes petits traverser la rue peut avoir des conséquences graves pour la vie des citadins que nous sommes, et le meilleur cadeau que tes parents puissent te faire, c’est un réverbère.

Le père bondit soudain : qui a dit ça, Irma ? Quel est cet imbécile heureux qui a bien pu te mettre cette idée en tête ?

La vague de colère de son père tira Cathy de sa croisière fluviale, et elle s’aperçut que les marins d’eau douce n’étaient pas son genre, finalement. Un beau brun, mécano à ses heures, le bleu plein de cambouis, trouva à ses yeux un certain intérêt. Emma, son amie(*), lui avait souvent parlé de ce terrible et doux frisson que procure la mobylette filant sur les chemins caillouteux qui bordent le gave de Pau. Seul problème : Raffy. Cet animal un peu idiot, (sans doute par mimétisme), se mettait systématiquement à courir après tout ce qui roulait, au risque de faire trébucher le pilote et de briser la machine. D’où également l’intérêt du lampadaire. Cathy y attacherait le chien et irait faire son tour de pâté de maisons en toute impunité, faisant la nique aux ténors du barreau dans un vrombissement décibellien juste en deça des bruyances autorisées. Il se trouverait bien alors un amoureux transi en train de caresser le chien à son retour, qui la complimenterait sur l’excellence de sa conduite, la patience de son chien, la luminosité féérique du réverbère dès la nuit tombée. Et dont elle tomberait follement amoureuse, bien évidemment. Il ne lui restait plus qu’à décider du prénom de l’heureux élu, et l’affaire serait jouée, grand panneau publicitaire lumineux à diodes en casquettes alimentées directement par des centrales d’achat à haut débit de ventes flashes payables illico presto il ne sera délivré aucun reçu en cas de récidive adressez-vous au tribunal le plus proche de votre domicile heures d’ouvertures sur simple appel, procéduriers acceptés. Le message brillerait dans la nuit : ZORBA, JE T’AIME !

A la mine que m’a présentée ce matin son âne de père, j’ai tout de suite compris. La vie rêvée des filles n’est pas pour les garçons des villes. Je me suis également dit que nous resterions quand même amis, tant Irma est jolie et affriolante, et que je louerai pour mon usage perso un réverbère ; il en reste de très jolis place Royale, sous les tilleuls, pleins de phalènes, sous lesquels on sussurre des mots plus tendres que la nuit. Dit la légende.

-par AK Pô

20 02 2010

(*) centre Leclerc de La Souterraine, voir article dans « La Montagne » 12 février 2010

(*) « Les amis d’Emma », roman de Claudia Schreiber éditions NiL

Avant de fermer la porte du temps…

C’était un jour de Noël où l’on demanda au père, qui somnolait sur sa chaise pendant que les reines et les rennes banquetaient , de révéler un secret. Il faisait beau, ce qui est rare dans le petit pays dès que l’on dessert la table le givre de l’ivresse perd son goût de raisin. Une légende raconte que quand cesse la ripaille, les célestes breuvages lors d’un joyeux festin, les nains rassemblés dans la cuisine pour découper la bûche font un rot tonitruant avant de la servir, petit peuple asservi, puis se racontent cette histoire.

C’était à Newcastle Upon the Tyne. Simonette marchait devant. Léo, qui était asthmatique, portait par élégance le sac à dos de sa compagne, et soufflait, projetant de petits nuages de vapeur, de ceux que seule en génére la tendresse. La rue était pentue et de larges plaques de béton, 80×80 environ, constituait le pavage des trottoirs de ce cette rue au doux nom de « Terrace ». Ils cheminaient vers une adresse où des jeunes de leur âge squattaient un appartement, dans cette cité minière que Margaret Thatcher avait détruite, malgré les travailleurs en grève qui avaient battu le pavé durant des mois, parmi les rangées de maisons accolées sous la morne pluie de ce début de mai où logeaient encore quelques ouvriers perclus sous le ciel charbonneux de cette Angleterre perdue.

Simonette courait devant lui, listant au passage les numéros de la rue que leurs amis avaient inscrit sur un bout de papier, dans un pub enfumé. Et soudain, elle s’était mise à sautiller sur les dalles, virevoltant comme une gamine joue à la marelle dans une école ou un autre monde.

Ce fut l’instant où Léo comprit que Simonette était la femme de sa vie.

25 12 2022

AK

Photo d’illustration : Bourisp, festival de photos de grands reporters (juillet-août près de Saint Lary, Pyrénées)

Pantalonnade, ou la vie suspendue

Je me souviens d’un jeune homme, qui était mon frère en ce temps-là, et dont le « Levis » était raide et tenait debout tant il était cradingue. J’en ai conservé l’odeur de ces gens qui, n’ayant jamais navigué sur les mers, gardent ce goût amer de fraternité disloquée sur les récifs de la vie. Ce jeune homme a vieilli, est devenu sans doute un fantôme, car si je pense à lui ce soir c’est mon pantalon qui me le remémore, suspendu au fil à linge du jardin. La même marque, dans l’immobilité de l’air, impassible sous le soleil, braguette ouverte sur le néant. C’était mon frère en ce temps-là, ses racontars initiaient ce que je voulais être plus tard, comme un héros de bande dessinée dont on suit les épisodes dans les revues, quand celles-ci reviennent lors de repas de famille, ou de nouvelles diffuses, quand le père signe un chèque qui assure quelque part la survie de l’étudiant inscrit aux Beaux Arts de Paris. Ce qu’ignoraient les parents, c’est qu’il ne suivait pas les cours, mais passait d’une année sur l’autre ses examens bidons avec réussite, alors que je redoublais ma première année au lycée. C’est ainsi qu’il a mené son destin : talent, puis arnaques, menteries, traficotages, bref sa réussite est devant mon souvenir : une urne de céramique installée dans le funérarium ; ça sent encore le pantalon usé, sale et puant d’un être , ce qu’ était mon frère en ce temps-là.

Pour autant je ne suis pas ce dément qui a détruit tous ces pots en pocelaine un soir de pleine lune dans le cimetière du village. Mon histoire pourrait en effet le laisser croire. Descendre des cendres c’est aussi partir en poussières, mais je suis sans arme ni haine pour m’attaquer aux morts, fussent-ils réduits en poudre. On prend souvent ses réalités pour des rêves et ses souvenirs pour des preuves d’existence. C’est une erreur. En fait, ne résistent au temps que les anecdotes. Elles sont plus nombreuses que l’existence elle-même. Jusqu’à devenir des histoires d’absence réitérées lors des repas familiaux, moment privilégié des fêtes où chacun, un verre à la main, se souvient de tous les membres décédés de la famille, des amis lointains perdus dans les îles de la mémoire embrumée . Et l’un raconte l’histoire du pantalon qui tenait seul tant il était cradingue, tiens, reprend un autre, c’est comme la grand-mère qui faisait sous elle et dont personne ne nettoyait les fèces, ou du cousin qui tomba dans la fosse septique pleine de doryphores.

Pourtant, personne n’évoqua le bris insensé des urnes funéraires. Pourquoi s’en soucier ? Tous les convives, femmes et enfants compris, savaient pertinemment que Dieu était mort et ne pourrait témoigner devant les juges bien réels. C’est même pour cela que la famille entière était réunie, ripaillant et buvant sur le cénotaphe. Sur le fil à linge pendait, à côté du « Levis », un hareng saur qu’un oiseau, de son bec couturier, avait suspendu, en hommage à celui qui fut mon frère, il y a bien longtemps.

22 12 22

AK

Veaux vaches moutons néo-zélandais, fini de vous la péter !

Pour lutter contre le changement climatique, la Nouvelle-Zélande veut taxer les pets de vaches.

À lire ici et n’importe où : La Dépêche du Midi

Casse-têtes

Ils m’ont tapé sur la tête

Je ne me rappelle plus pourquoi

Ni même si ça m’a fait mal

Parce que j’en suis mort

Qu’est-ce que j’étais déjà ?

Travailleur immigré, philosophe ?

Résistant caché, dissident notoire ?

Ou bien animal à fourrure ?

Je m’appelais comment, déjà ?

José, Abdel, Argentino ? Arabica, Jan Patocka ?

Ou bien alors bébé phoque ?

Ils m’ont tapé sur la tête

Je ne me rappelle plus pourquoi

Ni même si ça m’a fait mal

Parce que j’en suis mort

M’a-t-on assommé pour mes idées ?

Ou pour faire de moi un manteau ?

Pour de l’argent ou la couleur de ma peau ?

J’ai un bout d’os dans la mémoire

Quand leurs pieds chaussés m’ont cerné

Étais-je allongé dans des draps ?

Ou bien couché sur la banquise ?

Ou est-ce que je sortais d’un café ?

Je suis mort dans la rue de l’ouest

Sur la glace du nord ou chez les flics de l’est

Ou dans la pampa des casquettes

À coups de triques noires

Est-ce que je rêve de vengeance ?

De têtes policières éclatées ? De têtes de chasseurs sanglantes ?

De têtes de racistes en purée ?

Ou bien est-ce que je vois des têtes ?

Émerveillées d’elles-mêmes

Émerveillées de leur dedans

Et se découvrant Nouveau Monde ?

Je suis mort, répondez pour moi

Je m’appelais Jan Patocka

Argentin et bébé-phoque arabe

Maintenant, ça me revient !

Réchauffement climatique ?

Rions un peu avant l’hiver!

Un octogénaire arrive aux urgences avec un obus de la Première Guerre mondiale dans l’anus : l’hôpital partiellement évacué.

« Il s’est présenté, ce samedi 17 décembre, aux urgences d’un hôpital de Toulon (Var). Un homme âgé de 88 ans s’est présenté avec un obus de la Première Guerre mondiale dans son anus, nous racontent nos confrères de Nice-Matin. Une urgence inédite qui a obligé la direction de l’établissement a procédé à une évacuation partielle du bâtiment en raison des risques qu’une telle opération pouvait engendrer. 

Inoffensif

L’homme aurait affirmé, selon les informations de BFMTV, qu’il aurait trouvé l’obus chez son frère et a assuré aux soignants qu’il était démilitarisé. Long de 18 cm et large de 9 cm, l’engin a tout de même nécessité de faire intervenir les démineurs. Une tente a même été installée à cet effet et, pendant plusieurs heures, les autres patients ont été détournés vers d’autres hôpitaux. « 

La suite de l’article est à lire ici : La Dépêche du Midi

Oiseaux aux nids

Par foi (laïque) on écrit et parfois on se perd

Quand les arbres se déplument, que l’absence

En feuilles mortes sur un tapis moelleux

Gentiment installe une femme aimée

Sur la vie dépassée par de vieux horizons

Les rires sont tombés les branches dénudées

De tout cela le vent a chassé les plus belles images

Mais les arbres du jardin tremblent sous le vent d’ouest

Les oiseaux y signent des emprunts désargentés,

Que leurs chants au printemps viendront rembourser

Quand au bruit des fusils viendra le silence des pécheurs

Que la femme allongée sur son tapis de mousse

Asticotera son mari fainéant de ses foudres magiques

Par les ides de Mars, ce valeureux guerrier

Enfin remplira le panier d’osier de poissons frais

Au risque pour icelui que d’une profonde arête

Son dos soit transpercé en ce premier avril.

Alors, oiseaux des jardins, merles pies et passereaux

Ne craignez ni le chasseur, ni le pécheur, signez

En haut des arbres vos actes de propriété

Qu’aucun huissier, jamais ne viendra déloger.

Et toi, femme debout, de ces vieux horizons

Allume un feu qui brille dans la nuit, un brasier

Que tous les vents du monde emporteront

Chez eux quand nos cœurs s’éteindront, lassés

De nos clartés ,de nos espoirs stériles et inutiles

Car nous serons heureux de n’être qu’un peu partout

En étant nulle part, dans le chant des oiseaux

Dans la sève des arbres, dans le rire des feuilles

Dont nous savons le chant, qu’insuffle le vent d’Ouest.

17 12 2022

AK